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Cric & Crac, version couleurs
Et encore un artiste français, illustrateur et auteur de bandes dessinées largement oublié, Jean Trubert (dit Jen Trubert). Et pourtant, plus de 110 périodiques des années 1930 aux années 1980 se sont enrichis de sa verve graphique, de ses coloris et bien souvent également de ses textes.
La bande dessinée lui doit de très nombreuses séries. La plus célèbre est la saga du Chevalier Printemps. Mousse et Boule, quant à eux firent l'objet de trois albums et la reprise du personnage de Bécassine en 1959, selon le vœu de son créateur Pinchon, qui voulait faire de Trubert son héritier spirituel, eut son succès éditorial.
Pour Pilote il crée en 1964 le personnage de Roderic qui apparaîtra en tout et pour tout dans 3 histoires complètes de 6 planches chacune. Située dans un moyen-âge fantaisiste cette série fait bien sûr penser à sa série plus ancienne du Chevalier Printemps.
Il était impossible pour un enfant lisant des illustrés entre les années 1940 et 1970 de ne pas être placé sous le charme du dessin de Jean Trubert.
Ce n'est pas par hasard que pour ses débuts d'éditeur, Jacques Glénat proposa en 1977 ce qui resta le seul album pendant des années du Chevalier Printemps, un album broché et en noir et blanc...
Trubert illustre de nombreux classiques pour des éditions de bibliophilie, dont Le Roman de Renart. Ce dernier grand classique français et Jean Trubert, pour l'anecdote, sont indirectement à l'origine de Astérix.
C'est en pensant à un sujet bien français et après avoir réalisé une planche d'essai d'une adaptation du Roman de Renart, que Goscinny et Uderzo s'orientèrent plutôt vers les Gaulois apprenant que Trubert s'était déjà emparé 10 ans auparavant du même sujet ! (en 1949 dans Bravo).
Le grand plaisir de Jean Trubert se nichait également dans l'illustration. Pour la presse junior, comme dans Vaillant, ou dans Pipolin, Francs-jeux, Tintin.
Et nous arrivons à la presse féminine des années 1950-1960 avec le titre Femmes d'Aujourd'hui. Voici un hebdomadaire belge, très bien diffusé en France, qui a publié durant 30 ans des bandes dessinées à raison de trois planches par semaine. A son numéro 385 du 21 septembre 1952, Femmes d'Aujourd'hui commence donc à publier des "pages destinées à vos enfants". Quatre pages : trois de bandes dessinées et une de jeux et de contes.
Et c'est Jean Trubert qui participera, à raison d'une page par semaine, à l'inauguration de cette section destinée aux enfants avec un long récit en 120 planches intitulé Cric & Crac. Dans ces années, le magazine est imprimé en héliogravure en une ou deux teintes : vert wagon, marron, sépia, gris-noir.
L’héliogravure est un procédé permettant le transfert d’une image photographique sur une plaque de cuivre par l’intermédiaire de gélatine photosensible. Il est considéré comme le plus beau mode d’impression d’images photographiques. Ce magnifique savoir-faire fut mis au service de l’Art traditionnel en permettant enfin une reproduction fidèle des œuvres-dessins, peinture ou sculpture. Il permettait de reproduire une image aux dégradés subtils à partir de matrices gravées.
Cric et Crac a bénéficié de ce mode d'impression. Le procédé par héliogravure participe à l'attrait de ces planches, outre le dessin élégant et gracile de Jean Trubert et une composition des planches toujours enlevée et rythmée. Le french style ! Dans le magazine les planches seront imprimées le plus souvent en couleur sépia-marron, parfois en vert wagon. Pour l'album, la couleur est unifiée sur le sépia-marron.
Grâce à un contributeur généreux, toutes ces planches ressurgissent désormais de l'oubli dans un album couleurs reprenant les impressions en héliogravure, ouvrage de 130 pages, complètement inespéré ! Entrez dans l'univers du récit graphique de Jean Trubert.
Quelques visuels :
L'album en vrai :